SSD Intel 750 Series : le test à 2,4 Go/s

09 avril 2015 à 19h22
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Avec son 750 Series, Intel propose le premier SSD PCI-E utilisant l'interface NVMe et destiné au grand public. La promesse : des performances débridées, bien supérieures en lecture à celles des SSD SATA qui forment l'écrasante majorité de l'offre actuelle.

Intel annonce en effet jusqu'à 2,4 Go/s et 440 000 IOPS en lecture, et 1,2 Go/s et 290 000 IOPS en écriture. Pour rappel, le dernier SSD grand public de la marque, le 730 Series, était limité à 550 Mo/s et 89 000 IOPS en lecture, et 470 Mo/s et 74 000 IOPS en écriture.

Quant aux latences, elles sont réduites de manière significative : de 50 µs en lecture et 60 µs en écriture, on passe à 20 µs quelle que soit l'opération séquentielle.

Parvenir à de telles performances suppose l'utilisation d'un autre connecteur que le traditionnel SATA, à savoir le PCI-E. Mais cela ne suffit pas. Les Kingston HyperX Predator et OCZ RevoDrive, ou les SSD au format M.2 utilisent aussi le PCI-E, sans pour autant rivaliser avec le 750 Series pour ce qui est du nombre d'entrées/sorties par seconde. Pourquoi ? Parce qu'ils sont pour le moment limités par l'interface AHCI, que vient remplacer le Non-Volatile Memory Host Controller Interface Specification, ou plus simplement NVMe.

Si vous n'avez pas tout saisi de ce que vous venez de lire, ça tombe bien : le test du 750 Series d'Intel va nous servir de point d'appui pour évoquer ce qu'apportent le PCI-E et l'interface NVMe.

Nous en profiterons également pour distinguer les systèmes qui sont prêts à accueillir un SSD tel que le 750 Series, tant du point de vue matériel que de celui du système d'exploitation.

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Du SATA au PCI-E

Les SSD actuellement sur le marché utilisent le Serial ATA III (ou SATA 6 Gbps), limité à 750 Mo/s en théorie, mais plutôt à 600 Mo/s dans la pratique. Le SATA III constitue un goulet d'étranglement qui a pour conséquence de niveler les performances des SSD.

Tous les constructeurs annoncent ainsi depuis plusieurs mois des débits équivalents, de l'ordre de 550 Mo/s en lecture comme en écriture. Cette stagnation a profité au marketing, qui a dû trouver de nouveaux arguments, notamment en ce qui concerne les modèles haut de gamme.

L'arrivée du PCI-E devrait enfin redonner toute sa place aux composants et aux performances du firmware dans le choix d'un SSD. Tout d'abord parce que le passage en PCI-E permet de réduire les latences. Certes, le gain n'est pas aussi important que si l'on compare IDE et SATA, mais il est tout de même présent.

Mais surtout parce qu'en utilisant quatre lignes PCI-E 3.0, le 750 Series s'offre le débit théorique maximal de 3,94 Go/s, soit quatre fois plus que la limite actuelle.

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Attention toutefois. Les chipsets Intel actuellement dans le commerce ne sont compatibles que PCI-E 2.0. Pour fonctionner à plein régime, le 750 Series doit passer par les lignes PCI-E 3.0 directement connectées au processeur, sans passer par un chipset qui le limiterait de bien des façons. Il faudra donc s'assurer de disposer le SSD sur un port compatible.

Le NVMe, une interface pensée pour les SSD

Pour profiter pleinement des possibilités offertes par le PCI-E, il fallait aux SSD une nouvelle gestion. Depuis l'arrivée des premiers SSD, ces unités de stockage utilisent l'héritage des disques durs. L'interface (SATA), mais aussi le protocole d'interface, le fameux AHCI, ou Advanced Host Controller Interface, qui n'a d'avancé que le nom.

Le AHCI est la couche logicielle, vieille de plus de dix ans, qui se charge de faire le lien entre le système d'exploitation, et le contrôleur pilotant un périphérique de stockage. Implémentée au niveau du firmware de la carte mère, cette interface de gestion a été conçue pour organiser les données, en prenant en compte le fonctionnement des disques durs. C'est sur cette interface que se base le NCQ (Native Command Queuing) dont le but est de minimiser les déplacements de la tête de lecture. Un objectif rendu aujourd'hui obsolète sur la mémoire flash.

Obsolètes sont également les 32 commandes sur une seule et même file d'attente que cette interface peut gérer simultanément : si elles ne constituaient pas une limite à l'époque des disques durs, leurs faibles débits et leurs temps d'accès importants, c'est désormais le cas aujourd'hui, à l'heure du SSD.

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Le NVMe règle l'ensemble de ces problèmes. Cette spécification, dont la version 1.1 a été ratifiée en octobre 2013, est adaptée aux spécificités des SSD, à leur conception multicanale, et au temps d'accès quasi instantané de la mémoire flash. Elle ouvre ainsi la voie à un maximum théorique de 65536 instructions gérées sur 65536 files d'attente. De quoi voir venir et exploiter tout le potentiel d'un contrôleur comme celui du 750 Series.

Une puce issue des SSD pour l'entreprise de la marque (DC P3600 et P3700 annoncé en juin dernier), fonctionnant à 400 MHz et qui exploite simultanément pas moins de 18 canaux, contre un maximum de 8 pour les SSD traditionnels.

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Notez au passage que pour profiter du travail du contrôleur, Intel a prévu pas moins de cinq puces de mémoire vive de type DDR3-1600 afin d'effectuer le travail de mise en cache, pour un total de 2 Go.

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Pour quelles cartes mères ?

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Pour profiter du potentiel du PCI-E, le NVMe s'impose. Et pour bénéficier du NVMe, il existe des prérequis indispensables, concernant tout d'abord le firmware de la carte mère, qui doit prendre en charge cette nouvelle interface.

MSI, le premier, a annoncé la mise à jour de ses cartes mères. Asus lui a emboîté le pas, et Gigabyte l'a également fait tout récemment. Pour ces trois constructeurs, ce sont des modèles basés sur les chipsets H97, Z97 et X99 qui bénéficient de cette mise à jour. Nous les avons interrogés pour savoir si d'autres cartes mères allaient tirer parti du NVMe par la suite : visiblement, cela n'est pas dans les tuyaux.

On peut interpréter cela de deux façons : soit les constructeurs veulent faire jouer le marketing et profiter de l'intérêt du NVMe pour promouvoir de nouvelles cartes, soit ils suivent une recommandation émanant d'Intel. Les chipsets antérieurs à la série 9 seraient-ils incapables, pour une raison que nous ignorions, de prendre en charge le NVMe ? Nous avons posé la question à Intel, mais le fondeur ne nous a pour le moment pas fourni de réponse.

Quoi qu'il en soit, si vous disposez d'une carte mère dont le chipset n'est ni le H97, ni le Z97, ni le X99, impossible pour vous de tirer au maximum parti d'un SSD tel que le 750 Series.

Pour quels OS ?

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Le firmware de la carte mère n'est pas le seul à jouer un rôle dans la compatibilité avec le NVMe. Le système d'exploitation a aussi sa part de responsabilité. Contrairement aux cas des SSD PCI-E en AHCI, les modèles compatibles NVMe disposent d'un pilote standard pris en charge dans de multiples environnements, avec notamment la possibilité de l'utiliser comme disque système, c'est à dire de pouvoir démarrer sur cette unité. Ce qui n'empêche pas Intel de proposer son propre pilote, et au passage une version 3.3.0 de sa Toolbox, afin d'apporter de meilleures performances que celles offertes par le pilote standard.

Tout n'est pas si simple toutefois. À l'heure actuelle, chez Microsoft, seuls Windows 8.1 64 bits et Windows Server 2012 R2 64 bits assurent une compatibilité native avec ce pilote. Chez Apple, sans Yosemite, point de NVMe. De même, seuls les kernels GNU/Linux 3.10.0 ou ultérieurs prennent en charge le NVME. Enfin, Chrome OS tolère le NVMe depuis le 24 février dernier.

Windows 7 64 bits ou Windows Server 2008 R2 64 bits sont également capables d'utiliser un SSD NVMe, mais au prix d'une mise à jour. Et quoi qu'il arrive, vous ne pourrez pas démarrer sur le SSD.

Et quand bien même vous utilisez Windows 8.1, pour booter sur un modèle PCI-E NVMe, il faudra bien penser à choisir le mode de démarrage UEFI.

Résumons-nous : pour profiter à plein d'un SSD comme le 750 Series d'Intel, à savoir, l'utiliser comme unité système, il faut :
  • une carte-mère de la série 9 d'Intel (H97, Z97 ou X99), avec un firmware à jour ;
  • un port PCI-E Gen3 4x disponible ;
  • démarrer en mode UEFI ;
  • disposer d'un système d'exploitation compatible, comme Windows 8.1 64 bits, Windows Server 2012 R2 64 bits, OS X Yosemite, Chrome OS ou un système GNU/Linux adapté.

Endurance et consommation

Si les bénéfices apportés par un tel SSD en termes de performance semblent évidents, qu'en est-il de l'endurance ? Cette question est primordiale, surtout pour un SSD qui a vocation à être sollicité de manière intensive.

De ce point de vue, les progrès sont bien moindres, voire inexistants. Et pour cause : les puces utilisées par Intel dans son 750 Series sont peu ou prou identiques à celles que l'on trouve dans un 730 Series, à savoir des NAND IMFT (évidemment) gravées en 20 nm. Notre exemplaire de test compte ainsi 14 modules de 16 Go sur l'une des faces du PCB, 18 puces de 64 Go sur l'autre face, pour un total de 1 376 Go.

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Notre 750 Series de 1 200 Go dispose donc d'une généreuse réserve représentant 14% de la capacité du SSD. Intel appliquait déjà une politique semblable sur son 730 Series, avec pour but de proposer une endurance correspondant à l'écriture de 70 Go par jour durant 5 ans, soit une écriture totale de 219 To.

Un chiffre confortable et rassurant pour la plupart, mais qui reste bien inférieur à ce qu'a rendu possible la NAND 3D de Samsung : le 850 Pro, dans sa capacité la plus importante (1 To) supporte 300 To d'écriture.

Toutefois, Intel est également présent sur le marché de la mémoire 3D (voir SSD : la course à la NAND 3D est lancée) et il n'y a pas à douter de l'arrivée de cette technologie sur les SSD PCI-E NVMe de la marque, comme sur ceux de la concurrence par ailleurs.

Pas d'évolution non plus concernant la protection des données : Intel confie à deux condensateurs le soin de pourvoir le SSD en énergie pour terminer une écriture en cours lors d'un défaut d'alimentation, comme il le faisait déjà sur le 730 Series.

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Enfin, il est un domaine où on ne peut parler ni de gain, ni même de stagnation : c'est celui de la consommation. D'après les chiffres fournis par Intel, le 750 Series engloutit 4 watts au repos, et jusqu'à 22 watts lors d'une opération d'écriture, sur le modèle de 1,2 To. En comparaison, le 730 Series n'avait besoin que de 5,5 watts au plus fort de son activité.

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Qui dit consommation importante dit fatalement dégagement de chaleur non négligeable : le 750 Series est pourvu d'un impressionnant radiateur posé sur des puces elles-mêmes recouvertes d'un pad thermique. Un dispositif qui pourrait d'ailleurs se montrer un peu encombrant dans une configuration où la place viendrait à manquer.

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Les performances

IOmeter est un outil qu'il faut manipuler avec précaution lorsqu'il s'agit de tests de SSD. Ici, nous avons travaillé sur des secteurs et des fichiers de 4 Ko, avec des accès aléatoires à 100% (ce sont ceux qui sollicitent le plus le contrôleur), et selon deux scénarios différents :
  • une activité comprenant 25% de lecture, 75% d'écriture ;
  • un protocole qui comprend 75% de lecture et seulement 25% d'écriture.
Chacun de ces tests a été mené jusqu'à remplissage total du SSD et pour trois profondeurs de queue (QD) différentes : 1, 32 et 128. Pour apporter un élément de comparaison, nous avons ajouté les scores du Vector 180 d'OCZ, que nous testions récemment. AHCI oblige, pas de scores en QD=128 pour ce SSD.


Ce test met en avant les différences notables que l'on observe sur une utilisation avancée de son SSD. Dès QD=1, la différence est notable entre les deux SSD, avec des performances globalement trois fois supérieures pour le 750 Series. Un écart que l'on constate d'ailleurs également pour QD=32. Pas de doutes, dans ce type d'exercice, le 750 Series est loin, très loin devant les SSD conventionnels.

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ATTO donne une autre information quant aux performances du 750 Series en lecture et en écriture séquentielle de fichiers de tailles variables. On s'aperçoit que malgré une profondeur de queue égale à 10, sur les très petits fichiers, le 750 Series fait moins bien que le SSD d'OCZ. En revanche, dès que les fichiers atteignent 4 Ko, la différence se creuse considérablement. Notez qu'on retrouve bien les débits annoncés par Intel en lecture comme en écriture.

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CrystalDiskMark combine pour sa part une partie de tests séquentiels (sur un fichier de 1 Go) et une partie de tests aléatoires, avec différents scénarios (lecture et écriture d'un fichier de 512, puis 4 Ko, et de plusieurs fichiers de 4 Ko simultanément). Les différences constatées sont moindres que sous ATTO, et avec une profondeur de queue égale à 1, le 750 Series ne fait pas nettement mieux que le Vector 180 sur les opérations aléatoires impliquant des fichiers de 4 Ko.

Nous avons aussi effectué quelques tests pratiques, comme la décompression d'un fichier WinRAR de 1,85 Go contenant des fichiers de tailles diverses comprises entre quelques Ko et plusieurs Mo.

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Sans surprise, le 750 Series fait mieux que le Vector 180. Toutefois, la différence est ténue, preuve que le processeur et la mémoire vive font pour beaucoup dans ce genre de tests applicatifs.

Des tests de transfert sont évidemment de la partie : 1 fichier de 3,9 Go pour voir comment se comportent nos SSD sur les données de taille importante, et 1 Go de petits fichiers compris entre 12 et 34 Ko pour observer leurs performances sur les données de petite taille. Ces tests sont effectués à l'aide d'un RAMDisk de 4 Go fonctionnant sur de la mémoire cadencée à 1 866 MHz.

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Si les différences sont notables lors de transferts de gros fichiers, elles le sont nettement moins dès que l'on touche aux petits fichiers.

La copie proche, qui consiste à lire et écrire le même fichier, est une opération sollicitant beaucoup le contrôleur : il convient de voir comment nos concurrents s'en sortent.

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Le constat est identique au précédent : sur les longs transferts séquentiels, le 750 Series surpasse largement son concurrent, mais ce n'est pas le cas sur les petits fichiers.

Notre avis

À l'heure de conclure, le constat est clair : avec son 750 Series, Intel met à disposition du grand public un SSD aux performances redoutables. Comparés à ce support de stockage, les SSD actuels font évidemment pâle figure. Du moins lors de tests qui mettent en avant les possibilités offertes par le 750 Series.

Le souci, c'est que ces opérations sont plutôt exotiques si l'on considère l'usage d'un individu lambda, ou même d'un enthousiaste, à qui s'adresse sans aucun doute ce produit. Le 750 Series est issu de la gamme de SSD pour l'entreprise d'Intel, et ça se sent forcément.

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Intel a déjà procédé de la sorte avec le 730 Series, qui était lui aussi une déclinaison d'un SSD d'entreprise. Le fondeur fait ainsi profiter à tout un chacun des avancées technologiques dont bénéficient les professionnels. C'est parfait quand cela apporte véritablement quelque chose au grand public, mais difficile de dire que monsieur Tout-le-monde pourra bénéficier pleinement des performances offertes par le 750 Series.

C'est d'autant plus vrai que si Intel a bien travaillé en amont avec les constructeurs pour que tous mettent à jour les firmwares de leurs dernières cartes mères, embrassant ainsi l'indispensable interface NVMe, les conditions à remplir pour faire tourner le 750 Series à plein régime restent encore nombreuses. Et si les fameux enthousiastes visés par Intel parviendront sans mal à s'en accommoder, il n'en reste pas moins qu'un 750 Series est davantage dédié à un serveur fortement sollicité qu'à une machine conçue pour le jeu ou même le montage vidéo.

Enfin, à près de 1 euro le gigaoctet (389 dollars pour le modèle 400 Go, 1 029 dollars pour la version 1,2 To), le 750 Series sera l'apanage des plus fortunés. Ce SSD est donc un support incroyablement performant, qui a le mérite de démocratiser l'interface NVMe, et qui constitue une fenêtre sur ce que sera le SSD dans un futur proche. Mais pour l'heure, il restera sans nul doute cantonné à quelques passionnés.
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