Au Texas, SpaceX prépare le prototype SuperHeavy et ses 29 moteurs Raptor pour leur premier vol

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
05 août 2021 à 13h45
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Les 29 moteurs dépassent même un peu sur les côtés. © SpaceX/E.Musk
Les 29 moteurs dépassent même un peu sur les côtés. © SpaceX/E.Musk

La zone de lancement n'est pas encore terminée que les équipes de SpaceX ont déjà transféré le nouveau prototype SuperHeavy « BN4 » sur son nouveau socle. C'est la première fois que l'entreprise tente un assemblage complet, notamment avec le nombre final de moteurs. Une logistique impressionnante et un chantier titanesque.

Le décollage cependant n'est pas encore pour demain.

Plus belle la SuperHeavy

L'exemplaire BN3 avait déjà fait couler beaucoup d'encre le mois dernier, car il s'agissait du premier étage SuperHeavy à taille réelle à atteindre le site d'essais et de lancement à Boca Chica (Texas). Toutefois, ce dernier n'a subi que quelques tests sous pression, puis de remplissage de ses réservoirs avant un premier allumage statique… Mais il n'était équipé que de trois moteurs et semble un peu délaissé.

Ces derniers jours, c'est son successeur BN4 qui lui a volé la vedette, avec l'installation express (en moins de 48 heures) de 29 moteurs Raptor sur le site de production, avant un transfert en ce début de semaine vers la zone de lancement. Des images spectaculaires qu'Elon Musk, présent sur le site, s'est empressé de relayer et qui ont depuis fait le tour du monde.

Les équipes ont poursuivi leurs grands travaux au mois de juillet, et BN4 présente plusieurs améliorations par rapport à son prédécesseur, en plus de sa véritable grappe de moteurs qui « dépasse », l'étage SuperHeavy n'étant pas équipé d'une jupe de protection comme Starship.

Il y a notamment la présence de quatre grilles de stabilisation, qui ressemblent fort à celles installées sur les lanceurs Falcon 9, avec une différence notable d'échelle. Sur SuperHeavy, ces dernières resteront déployées tout le temps, pour éviter les risques et la complexité en vol. Selon Elon Musk, l'impact aérodynamique est des plus limités.

Numéro d'équilibriste

Le support sur lequel est transporté SuperHeavy (70 m de haut) est spécifique lui aussi, capable d'enserrer la base de l'étage tout en protégeant la baie de propulsion. On retrouve une structure relativement similaire formant la table de lancement sur le nouveau pas de tir. Installé grâce à l'une des énormes grues en place ces 4 et 5 août 2021, le SuperHeavy BN4 semble déjà prêt à s'élancer…

Il faudra malgré tout que les spectateurs et les équipes de SpaceX soient patients. D'une part, car il semble que les travaux d'infrastructure ne soient pas terminés sur place pour accommoder toutes les liaisons nécessaires et procéder à un lancement. D'autre part, parce qu'il manque encore Starship, à installer pour la première fois au-dessus d'un étage SuperHeavy.

Ensemble, ils formeront un titanesque lanceur de 120 mètres de haut. C'est le prototype SN20 qui devrait prendre place sur BN4, et ce dernier reçoit actuellement ses dernières touches de préparation sur le site de production, notamment un revêtement complet de tuiles thermiques sur le « ventre », les ailerons et les plans canards, afin d'être capables de résister aux frottements lors de sa future rentrée atmosphérique.

L'arrangement central des moteurs de SuperHeavy reprend le schéma à 9 moteurs de Falcon 9. © SpaceX
L'arrangement central des moteurs de SuperHeavy reprend le schéma à 9 moteurs de Falcon 9. © SpaceX

Bientôt l'heure des tests

Il reste cependant des étapes critiques avant que la première tentative de vol orbital puisse avoir lieu. Il faudra en particulier remplir les réservoirs et essayer d'allumer les 29 moteurs simultanément (même si, dans les faits, c'est très légèrement séquencé) pour évaluer la qualité des interfaces et des tuyauteries moteur ainsi que du contrôle pour les premières secondes de vol.

Ensuite, bien sûr, il faudra ramener Starship pour l'assembler sur SuperHeavy et gérer le remplissage des réservoirs d'un Starship placé aussi haut et sur la structure en acier… À chaque étape en prévision du vol futur, il y aura toute une ribambelle de vérifications, et il faut potentiellement s'attendre à une longue campagne de tests… Ou bien à de la casse. Sans oublier tout un lot de permis, à obtenir avant de quitter la zone en passant par le ciel.

Nous cherchons le formulaire A-38

En effet, pour ce premier tir à vitesse orbitale (en réalité une très longue parabole entre le Texas et Hawaï), SpaceX devra de nouveau convaincre la puissante fédération aéronautique américaine (FAA) que tout est mis en place pour la sécurité des travailleurs comme du public, en particulier en cas de catastrophe.

Et la situation de la tour de lancement n'est pas résolue non plus : SpaceX aurait construit la haute structure sans avoir l'aval préalable d'une enquête d'impact écologique. Pour rappel, le site de Boca Chica se trouve entre deux espaces naturels protégés. Certains voient ainsi l'assemblage final du lanceur sur sa zone de lancement comme un appel du pied direct à l'agence, dont Elon Musk a plusieurs fois dénoncé la lenteur administrative… Un bras de fer n'étant pas souhaitable pour qui souhaite voir un jour Starship décoller, il faudra un jour que les deux parties s'entendent !

Source : Teslarati

Eric Bottlaender

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

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Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

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Commentaires (18)

malak
Hâte de voir cette magnifique boule de feu!
Gab1
Épatant ! Ca doit être terriblement excitant de travailler sur ces projets, même si l’exigence doit être très importante.<br /> Une vraie aventure technique et industrielle.
Kahn-San
impressionnant la taille de l’appareil (et encore il en manque un morceau ), on se demande comment tout ça tient debout avec tout ce poids quand le plein sera fait<br /> hâte de voir ce que ça va donner en conditions réelles
sirifa
On se demande aussi comment ca fait pour tenir vide ! (c’est à dire sans la pression des ergols dedans !)
Fulmlmetal
Monstre impressionnant, on a hate de voir ça<br /> @L’article «&nbsp;En effet, pour ce premier tir à vitesse orbitale (en réalité une très longue parabole entre le Texas et Hawaï),&nbsp;»<br /> On appelle ça aussi un vol suborbital …
kanda
Quel monstre ^^
Morlac
Et du coup au niveau de la FAA ça donne quoi ?
Element_n90
Quand c’est vide c’est «&nbsp;super&nbsp;» léger donc la structure résiste sans «&nbsp;problème&nbsp;»…
Fulmlmetal
Element_n90:<br /> Quand c’est vide c’est « super » léger donc la structure résiste sans « problème »…<br /> Là oui mais en règle général ce n’est pas si évident. Par exemple pour Ariane 4 les réservoirs était rempli de gaz neutre, justement pour solidifier la structure, sinon la fusée risquait de s’effondrer sur elle meme… C’est ce qu’on nous avait dit lorsque j’avais visité le CSG à l’époque.
GRITI
Sacrée grue…
ebottlaender
Alors pas tout à fait <br /> C’est un vol assez hybride. Certes, il ne fait pas un tour de la planète, mais il est bien prévu d’envoyer Starship en orbite basse, avec la bonne vitesse pour qu’il fasse une orbite, donc à vitesse orbitale. Une fois un demi-globe parcouru, il freinera et quittera l’orbite pour venir se poser à Hawaï… En tout cas c’est ce qui est prévu pour le moment.<br /> Du coup, c’est pas tout à fait un vol orbital car il ne fait pas une orbite complète, mais il va bien à la vitesse orbitale.<br /> Bref un vol bien ennuyeux à expliquer.
Fulmlmetal
ah ok, donc là effectivement on a à faire à un vol sur une trajectoire orbitale avec une désorbitation précoce<br /> Merci pour ces précisions
Element_n90
@Eric BOTTLAENDER<br /> – La multiplication des moteurs n’avait il pas été l’une des raisons de l’échec de la N1 ? Celle-ci avait 30 moteurs comme SH.<br /> – Il est prévu d’y mettre aussi une voiture dans celui-là ? Ou peut-être le proto du «&nbsp;semi&nbsp;» de Tesla…
EricARF
Elon Musk, l’homme qui déplace les limites. Un Howard Hughes moderne sans les troubles mentaux. J’admire ce gaillard.
_Troll
J aimerais vous demander, savez-vous pourquoi sur les video de l appareil New Shepard de Blue Origin, la tuyere est fixe, immobile et au contraire sur le Starship de Spacex, les tuyeres semblent mobiles et s orienter en temps reel pour stabiliser et orienter le vaisseau.
mcbenny
Parce que sur New Shepard, la direction est à l’avant
EricARF
Musk sait qu’un échec peut devenir une leçon. Ça fonctionnera mieux qu’hier et moins bien que demain.
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