SpaceX perd une quarantaine de satellites Starlink à cause d'une tempête solaire

Eric Bottlaender
Spécialiste espace
09 février 2022 à 12h30
37
Notre étoile, qui est parfois de fort mauvaise humeur © NASA
Notre étoile, qui est parfois de fort mauvaise humeur © NASA

Après leur décollage le 3 février, les 49 derniers satellites de Starlink étaient en orbite très basse, le temps de tester leurs systèmes de bord. Une tempête solaire a généré une augmentation de la traînée atmosphérique, ce qui a freiné les satellites. Résultat : 40 unités sont déjà ou vont être désintégrées sous peu.

Il n'y a cependant aucun danger pour les populations au sol.

C'est pas nous, c'est le Soleil

Voilà une tempête solaire qui va coûter cher à SpaceX, alors que l'entreprise déploie de nouveaux efforts pour tenter de rentabiliser son service de connectivité internet via l'orbite, avec déjà plus de 2 000 satellites.

Le décollage du 3 février s'était pourtant bien passé, avec une éjection des 49 satellites en orbite basse, suivie par une prise de contact individuelle et une évaluation des systèmes de bord. L'entreprise californienne envoie ses unités sur une orbite très basse, avec un périgée (le point le plus proche de la Terre) de seulement 210 kilomètres d'altitude. Cela a des avantages, par exemple l'économie d'énergie pour le lanceur Falcon 9, ou le fait que si un satellite ne fonctionne pas bien, il sera désintégré dans l'atmosphère dans les semaines qui suivent le décollage. Malheureusement pour SpaceX, moins de 24 heures après le tir, les effets d'une tempête solaire ont atteint la Terre, avec de lourdes conséquences.

Satellite vs atmosphère

Les tempêtes solaires, à moins d'être d'une très forte intensité, n'ont en général que peu d'impact sur les satellites en orbite basse, protégés par les (fameuses) ceintures de Van Allen. Mais il est fréquent qu'elles impliquent un changement de densité dans les très hautes couches de l'atmosphère : cette dernière n'est pas une « bulle » qui s'arrête à 100 kilomètres d'altitude.

Pour les satellites en orbite très basse, sous les 300 kilomètres, l'effet est immédiat : un freinage induit par les frottements des particules atmosphériques. SpaceX indique que ses satellites tout juste éjectés ont été soumis à 50 % de frottements en plus ! Inévitablement, dans cette situation, il faut prendre des mesures d'urgence… Mais il n'y a pas grand-chose à faire sur ces unités de plusieurs centaines de kilos, puisqu'ils sont propulsés avec de petits moteurs ioniques. Ils ont donc été basculés en mode de sauvegarde pour tenter de les faire voler « sur la tranche » et de présenter leur profil le plus aérodynamique.

Les satellites Starlink ne sont pas conçus pour des manœuvres rapides et énergivores de ce type © SpaceX
Les satellites Starlink ne sont pas conçus pour des manœuvres rapides et énergivores de ce type © SpaceX

La tuile

Hélas, cela n'aura pas suffi : 40 des 49 unités sont rentrées ou vont rentrer dans l'atmosphère, et le sort des 9 derniers n'a pas été précisé dans le communiqué de SpaceX. L'entreprise souligne le soin qu'elle prend à produire des satellites qui se consument à 100 % sans laisser de débris éventuels retomber sur la surface, mais aussi le fait que ces orbites très basses aident à poser le moins de problèmes possible de trafic dans l'espace.

L'événement est inédit, même si pratiquement 10 % des 2 100 unités Starlink envoyées dans l'espace depuis 2019 sont désactivées, déjà désintégrées ou sur le chemin… Le taux de perte, important, a encore grimpé. Et même si SpaceX finance la campagne de vol comme la production (ce qui implique des envois à prix coûtant), c'est un coup dur à plusieurs dizaines de millions de dollars. Inévitable ?

Source :SpaceX

Eric Bottlaender

Spécialiste espace

Spécialiste espace

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser v...

Lire d'autres articles

Je suis un "space writer" ! Ingénieur et spécialisé espace, j'écris et je partage ma passion de l'exploration spatiale depuis 2014 (articles, presse papier, CNES, bouquins). N'hésitez pas à me poser vos questions !

Lire d'autres articles
Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ? Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
google-news

A découvrir en vidéo

Rejoignez la communauté Clubic S'inscrire

Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.

S'inscrire

Commentaires (37)

benben99
Et oui, grace à Space X on aura encore plus de déchets dans le ciel…<br /> Tout ca parce qu’ils n’ont pas prévu de solution.
zeebix
Dans ce cas précis, étant trop bas, ils vont tomber et disparaitre. Bon pour tous les autres fonctionnel en revanche oui c’est moins sympa…
RomoR
Faut lire l’article avant de répondre non?<br /> Ils vont être désintégrés dans l’atmosphère.
Guillaume1972
Ils sont très loin du nombre total de satellites, à la fin il y en aura entre 16000 et 42000. Ce serait très étonnant qu’à la fin il y aura moins de satellites (SpaceX) que d’étoiles que l’on voit aux yeux nus
benben99
Et la pluie de dechets fins?
Morak
Aïe ça pique :s
fredolabecane
La nature reprend ses droits…
cid1
Je dis « bien fait », reste à l’envoyer avec une grosse balayette en orbite balayer la m… qu’il a laissé lui et le soleil (Vive Râ)…
MattS32
Il tombe sur terre plusieurs milliers de tonnes de poussière et de petits objets provenant de l’espace. Même 40 satellites Starlink d’un coup, ce n’est pas bien gros en comparaison (de l’ordre de 0.2%).
benben99
Si tu t’en prend un morceau sur la tronche, tu ne vas pas rigoler…<br /> C’est aussi dangereux pour les autres satellites, potentiellement.
Martin_Penwald
Le taux de panne des satellites StarLink est aux alentours de 3%, c’est-à-dire que sur chaque lancement de 50 satellites, il y en a 1 ou 2 qui ne fonctionnent pas. Cet événement ne va pas contribuer à améliorer ça.<br /> Ce qui aurait tendance à donner raison aux gens qui pensent que le service ne sera jamais rentable, voire jamais fonctionnel tel qu’envisagé au départ, alors que StarLink a reçu d’importants subsides de l’état fédéral sur la base de ces promesses de service.
MattS32
benben99:<br /> Si tu t’en prend un morceau sur la tronche, tu ne vas pas rigoler…<br /> Même réponse : par rapport à tout ce qui tombe annuellement sur terre, ça ne fait augmenter que d’un pouillème la probabilité de se prendre quelque chose sur la tronche…<br /> De toute façon, tout ce qu’on envoie en orbite autour de la Terre finira par nous retomber dessus, quoi qu’il arrive.<br /> benben99:<br /> C’est aussi dangereux pour les autres satellites, potentiellement.<br /> Pour le coup, absolument pas. Ce qui est dangereux, c’est quand un satellite est détruit alors qu’il est encore sur son orbite normale (comme lorsque les chinois, les russes, les américains ou les indiens s’amusent à essayer leurs armes anti-satellites pour montrer qu’ils ont la plus grosse…).<br /> Un satellite qui se désintègre lors de sa ré-entrée dans l’atmosphère (c’est bien de ça qu’on parle ici, ces satellites Starlink ont perdu de la vitesse, donc vont perdre de l’altitude et faire leur ré-entrée, et c’est à ce moment là qu’ils vont être détruits, pas avant) par contre, ça n’est pas un problème pour les autres satellites : les débris engendrées sont à une altitude bien plus basse que les orbites des satellites (puisque c’est dans l’atmosphère) et ont des vitesses beaucoup trop faibles pour qu’ils restent en altitude, ils vont retomber très vite.
zeebix
Il me semble que c’est un phénomène trop imprévisible, ils arrivent déjà difficilement à dire la météo de demain … alors …
MattS32
Les satellites ont été ralentis par la tempête. Qu’elle soit prévue ou non, le résultat est là est inévitable.
adippe
@Peggy10Huitres à ce jour, pour autant que je le sache, rien ne permet de prédire une éruption solaire avec certitude. On ne fait qu’extrapoler des schémas constatés au préalable. Quand au temps entre l’éruption et l’arrivée des particules il est trop court pour que ces petits satellites puissent se mettre à l’abris, alors autant qu’il restent là ou ils sont car c’est là qu’il seront le moins dangereux lors de leur désintégration.<br /> En gros, là c’est un coup de pas-de-chance à quelques millions de $
ebottlaender
En l’occurrence, plusieurs observateurs critiquent SpaceX aujourd’hui, pour ne pas avoir anticipé l’arrivée de cette tempête solaire (c’est sur quelques jours, ils auraient théoriquement pu retarder leur décollage).<br /> Après, nous n’avons pas les détails. Peut-être son effet a-t-il été sous-estimé, peut-être que l’analyse de risque n’est pas arrivée jusqu’à la bonne équipe, etc.<br /> La prochaine fois, ils feront attention !
MattS32
La vitesse du vent solaire est de l’ordre de 1.5 à 3 millions de km/h. Il ne s’écoule donc que 2 à 4 jours entre une éruption solaire et l’arrivée du vent solaire sur Terre.<br /> Ces satellites étaient donc déjà lancés quand l’éruption a eu lieu.<br /> Et tant que l’éruption n’a pas eu lieu, le vent n’est pas prévisible. On peut prévoir qu’il va y avoir une tempête solaire après une éruption, mais on ne peut pas prévoir une éruption.
ebottlaender
Non, l’éruption a eu lieu avant le tir.
MattS32
Oki, j’avais mal lu, comme on est le 9 et que le tir à eu lieu le 3, je pensais que la tempête avait eu lieu 6 jours après le tir, pas 1 jour après. My bad.
ebottlaender
Après comme dit, on a pas forcément tous les tenants et aboutissants. Si ça se trouve, comme ça n’a jamais constitué un problème pour eux jusque là, ils n’observent pas la météo spatiale, ou pas juste avant le tir ? Peut-être qu’un responsable a décidé de passer outre, ou bien le type qui s’en occupe avait le covid, ou autre…<br /> Il y a des oreilles qui chauffent depuis une semaine, ça c’est sûr ^^
benben99
C’estun travail d’amateurs
Voigt-Kampf
Les éruptions solaires ne sont pas censées éjecter comme cela des satellites tournant autour de la Terre…<br /> Le renouvellement au plus tôt du cycle solaire est en 2025 : Le Soleil a débuté son 25e cycle d'activité, annonce la Nasa : qu'est-ce que cela signifie ?
toast
Le mec est inépuisable
ebottlaender
2025 c’est le maximum d’activité, le cycle en cours commence tout juste à monter en puissance.
Voigt-Kampf
C’est précisément ce que je veux dire. Nous sommes encore dans une baisse d’activité solaire. Quelque chose qui permet l’éjection de l’orbite de satellites tournant autour de la Terre doit avoir une puissance non négligeable. Mais pas forcément prédictible. Donc il y a un souci quelque part.
Palou
benben99:<br /> C’estun travail d’amateurs<br /> c’est sûr, les chinois auraient fait mieux … ou pas !
jfk68
A la décharge de SpaceX c’est la 1ère fois que cela arrive. Seul Skylab dans les années 70 s’est désintégrer plus vite que prévu à cause d’éruptions solaires.<br /> Il faut dire aussi que SpaceX utilise ce protocole de mise en orbite à partir d’une orbite très basse (200km) justement pour éviter les déchets. Un satellite est en panne avant sa mise en orbite définitive (à 500km) ? Pas grave il se désintègrera en quelques semaines…
PaowZ
Je pense aussi qu’ils ont sous-estimé l’impact du vent solaire… mais ça me paraît tellement énorme comme bévue… ce qui est sûr, c’est que les moteurs ioniques seront trop faibles pour compenser… Apres, bon bah… ils prennent de l’expérience, quoi…
Alpin
Faut lire avant d’écrire !
Nicolas51
10% de pertes soit 210 satellites sur 2100 en quelques années il n’y a que moi que ça choc ? C’est considérable.<br /> C’est vraiment des satellites jetables en fait
MattS32
C’est exactement ça. Ils ont jugé qu’il était moins cher d’avoir 10% de pertes que d’améliorer les satellites et les procédures pour éviter ces 10% de pertes.
Palou
jusqu’au jour où les assurances vont dire niet
Voir tous les messages sur le forum
Haut de page

Sur le même sujet