Laurent SORBIER : eAuction Room, ventes aux enchères sur le Net

06 juin 2001 à 00h00
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Directeur général de eAuctionRoom.com, Laurent SORBIER présente ce site de ventes aux enchères et analyse son environnement économique.

JB - Laurent SORBIER, bonjour. Après le funky business chez Spray, vous prenez la direction générale de eAuctionRoom. Pouvez vous présenter rapidement votre parcours ?

LS - Bonjour, j'étais en effet vice président et donc numéro 2 de Spray France, dont j'ai assuré le lancement sur le marché français. Par rapport aux dirigeants de start-up, j'ai la particularité d'avoir fait une partie de mon parcours dans le public. Pour un français, j'ai commencé très tôt à m'intéresser à l'internet, dès 1994, à l'occasion de ma coopération au service culturel de l'ambassade de France à New-York.

J'ai pris le pari de me spécialiser dans l'internet, dès mon retour en France. En 1995, j'ai ainsi rejoins le cabinet du ministre des télécommunication en tant que responsable du dossier internet. J'ai ensuite continué dans cette voie en rejoignant le commissariat général au Plan pendant 18 mois, où j'étais en charge du
département technologies de l'information qui regroupe internet mais aussi les télécoms, la télévision interactive ou encore les nouveaux médias.

A cette époque, peu de personnes disposaient d'une vision stratégique pour l'internet. J'ai ainsi été approché par Spray qui était à la recherche de quelqu'un pour monter sa filiale française. En un peu plus d'un an, nous avons réussi à imposer notre marque, à créer un trafic de plus de 50 millions de pages par mois sur le portail pour 300.000 membres et enfin à racheter Caramail et PageFrance, ce qui nous a permis de rejoindre le top 10 en France au bout de seulement 8 mois ce qui est quand même pas mal.

Suite à certains flottements stratégiques chez Spray, j'ai décidé de quitter la société à l'été 2000, quelques mois avant son rachat par . J'ai cherché un nouveau projet présentant des garanties en terme de pérennité et de profitabilité car l'époque devenait plus difficile pour les sociétés internet. C'est le projet eAuction
Room qui m'a séduit.

JB - Média, Marchand ? Comment peut-on définir eAuctionRoom ?

LS - eAuctionRoom est une place de marché qui permet aux internautes de participer, en temps réel, à une vente aux enchères elle aussi réelle, où intervient un véritable commissaire priseur dôté d'un marteau, en revivant l'atmosphère de la salle et en se battant contre les autres participant dans la salle.

Il s'agit donc de greffer l'internet sur un business et un process de vente qui existent déjà . Toute l'originalité d'eAuction Room est d'avoir développé une technologie qui permet d'agir dans une salle des ventes comme si l'internaute était présent physiquement mais via internet.

eAuction a trois principaux avantages. Tout d'abord, la plate-forme est gratuite pour l'internaute puisque notre modèle consiste à faire payer les commissaires priseurs. Ensuite, nous garantissons la conformité de la description des objets vendus avec la réalité puisque nous passons par des experts (les commissaires priseurs et que la loi impose 10 ans de garantie), ce qui tranche avec les simples enchères CtoC sur le web, un secteur connaissant beaucoup de litiges. Enfin, eAuctionRoom contourne le problème des paiements car ceux ci s'effectuent offline, directement avec le commissaire priseur.

JB - "real time bidding", "streaming". la composante technologique reste essentielle dans votre métier ?

LS - Il faut bien comprendre que l'aventure eAuctionRoom est d'abord une aventure technologique. Ses fondateurs ont constaté que les enchères CtoC sur internet, qu'on peut encore qualifier de "ventes à la bougie", ne correspondaient pas à ce qui se faisait de plus performant. En effet, depuis 400 ans, il existe un système qui consiste à regrouper tous les acheteurs intéressés par un produit dans une même pièce et à les inviter à se décider en un temps très court.

Quand ces fondateurs ont commencé à expliquer, il y a plus de 2 ans, qu'eAuctionRoom devrait pouvoir gérer des processus de vente sur internet, avec des acheteurs aux quatre coins du monde, transmettre en temps réel leurs ordre d'achat sans ralentir la procédure de vente dans la salle réelle, certains prestataires techniques pensaient que c'était de la science-fiction.

Nous avons néanmoins développé une telle plate-forme grâce à près de 20 millions de francs d'investissement, capable de gérer de fortes montées en charge, ce qui constitue désormais une véritable barrière technologique. Lors de la vente du Dôme du Millénaire, à Londres, nous avons proposé 40 heures de ventes en 3 jours, ce qui a constitué un volume de 3.000 enchères pour 2 millions de pages vues.

Mais au delà des éléments techniques, notre grande satisfaction est d'avoir su convaincre les commissaires priseurs et de très nombreux professionnels du monde des enchères d'utiliser notre plate-forme.

JB - Peut-on parler de positionnement haut de gamme pour vos services ? Pouvez vous préciser votre modèle économique ?

LS - Le positionnement haut de gamme est une illusion complète liée au fait que les ventes aux enchères et les commissaire priseurs sont souvent assimilés à des objets très chers, réservés à un public d'initiés. La réalité est que l'on trouve de tout dans les ventes aux enchères publiques : antiquité, cartes postales, vin, et certains objets de grande valeur en effet comme une oeuvre de Delacroix, estimée de 15 à 20 mF, qui sera vendue le 18 juin prochain sur eAuctionRoom.

Pour revenir sur le modèle économique, le service est gratuit pour l'utilisateur et nous facturons notre prestation au commissaire priseur qui bénéficie d'une mise en ligne du catalogue (fiches détaillées avec photos haute définition), d'une retransmission de la vente et d'enchères en temps réel.

Nous prélevons en outre une commission de 2 à 5% sur les ventes réalisées grâce à notre intermédiaire. Enfin, beaucoup de personnes s'intéressent à notre technologie que nous pouvons proposer sous forme de licence, en mode ASP.

En définitive, nous n'avons qu'un seul concurrent au niveau mondial qui s'appelle eBay Premier, déclinaison haut de gamme de eBay. Le panier moyen sur eBay est de 20$ contre près de 15.000 francs sur eAuctionRoom.

JB - Vous avez levé 75mF. Est-ce que votre activité commerciale vous permet d'atteindre la rentabilité ? allez vous lever à nouveau de l'argent ? envisagez vous une introduction en bourse ?

LS - Nous avons effectivement levé 25 mF puis 50mF au cours de l'été dernier dans un contexte difficile - preuve de la crédibilité du projet- auprès de partenaires financiers tels que la Financière de Rotschild, le groupe Rallye, Innovacom et Didier BENCHIMOL.

Si nous attendons la rentabilité pour le deuxième trimestre 2002, nous n'excluons pas la possibilité d'une autre levée, pour faire face à une concurrence éventuellement croissante de Ebay ou pour saisir des opportunités de marché...

JB - Disposez vous d'éléments quantitatifs sur le marché des enchères ?

LS - Ce marché est estimé à 12 milliards d'euros en Europe. En France, il représente un chiffre d'affaires de 30 milliards de francs pour 60.000 emplois. Mais eAuctionRoom ne se limite pas au monde de l'Art et du Luxe car nous entamons une diversification dans les ventes industrielles où les montants sont de l'ordre de ... 400 milliards d'euros par an !

JB - Qu'avez vous pensé de l'expérience Amazon-Sotheby ? Après AOL.fr et Noos, envisagez vous de nouveaux partenariats ?

LS - Sotheby's - tout comme Christie's d'ailleurs - n'a pas abordé l'internet de manière efficace mais il n'est pas exclu que ces derniers deviennent un jour clients pour notre technologie. Pour les partenariats, nous pensons qu'il existe une complémentarité entre le CtoC et ce que nous faisons. Il n'est donc pas exclu que nous
allions les voir pour leur proposer des partenariats ou la vente de licences de notre technologie.

JB - Pourrait-on même envisager des partenariats capitalistiques ?

LS - Nous avons la chance de connaître une croissance organique très satisfaisante. Notre priorité est donc le développement et non une réflexion sur un rapprochement stratégique avec un autre acteur du monde des enchères.

JB - Monsieur laurent Sorbier, je vous remercie.
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