Dossier : l'envers technique de la 4G

06 janvier 2014 à 15h08
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On en parlait depuis des années et la voici arrivée en France. Mais c'est une révolution un peu inachevée. Si elle montre de fantastiques progrès en mode données, elle oublie la voix. Il faudra attendre la prochaine génération pour que la révolution soit complète. En attendant, entrons dans les tenants et les aboutissants techniques de la 4G telle qu'on la connait aujourd'hui.

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Grande absente de la révolution 4G (famille LTE ou Long Term Evolutiion), la voix. Elle fonctionne toujours en mode circuit, comme en 3G et même en 2G. Paradoxal, puisque la téléphonie mobile a d'abord été créée pour permettre d'appeler par téléphone de n'importe où et d'être appelé. La 4G est centrée sur le monde de la donnée sur IP. Avec la 3G, on est passé du banal téléphone portable à clavier au smartphone qui s'apparente à un micro-ordinateur de poche tactile, plus performant qu'un PC portable d'il y a une dizaine d'années. Avec la 4G, sa puissance est accrue.

Première impression de l'utilisateur, une nette augmentation du débit. Ainsi, le 3GPP (3rd Generation Partnership Project), l'organisme de normalisation des réseaux de mobiles, a fixé, dans les releases 8 et 9, relatifs à la 4G, le débit théorique descendant (de la station de base vers le terminal) à 300 Mbit/s et celui montant à 75 Mbit/s. Des chiffres qui correspondent à une situation optimale, quasiment en mode démonstration. L'expérience montre que le débit réel doit être divisé au moins par deux et que celui à un instant T est impossible à prévoir, puisque le média radio est, par essence même, partagé : plus il y aura d'utilisateurs communiquant simultanément, moins chacun disposera de bande passante.

La 4G devrait également se caractériser par un meilleur confort de visionnage, par exemple d'une vidéo en direct (streaming), qui ne se figera plus en cours de lecture. Phénomène qui n'est d'ailleurs pas dû à l'augmentation du débit, mais à la baisse de la latence (temps de traversée du réseau) et à celle de la gigue (variation du temps de latence).

Cependant, du point de vue des constructeurs et des exploitants, la 4G est loin d'être juste un progrès entre celle-ci et la 3G+ (famille UMTS ou Universal Mobile Telecommunications Systems). « Le bond technologique entre ce nouveau réseau et le précédent, la 3G, est bien supérieur à celui entre la 2G et la 3G », déclare Jean-Luc Vuillemin, directeur technique des réseaux et services chez Orange. « Non seulement l'accès radio est différent, mais surtout l'architecture du cœur de réseau est nouvelle et s'inspire de celle des réseaux informatiques IP ».

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Une antenne. Crédit : Jackin - Fotolia.com

3,9G ou 4G ?

Bien sûr, il est possible d'établir une banale conversation téléphonique depuis un mobile 4G. Le réseau met alors en œuvre le processus dit de CS Fallback (Circuit Switch Fallback), c'est-à-dire le basculement vers la 3G. Sur certains terminaux ce petit tour de passe-passe est visible : il affiche alors 3G au lieu de 4G. Quelques constructeurs américains ont résolu autrement le problème en intégrant dans le même boîtier deux téléphones : l'un pour les communications vocales l'autre pour les communications de données. Évidemment, tout cela est transparent pour l'utilisateur. C'est le module téléphonique concerné qui prend la main. L'ennui est que le terminal est plus épais et, surtout, que l'autonomie de la batterie en est affectée, puisqu'elle doit alimenter deux modules à la fois.

Il existe une troisième méthode, dite VoLTE (Voice over LTE), IP de bout en bout, qui sera native dans la prochaine génération appelée LTE-Advanced et qu'il est d'ores et déjà possible de mettre en œuvre dans la 4G. Mais cela suppose la présence, dans le cœur de réseau, d'une architecture IMS (IP Multimedia Subsystem), afin, notamment, de traiter la signalisation spécifique aux paquets vocaux et, dans le téléphone, d'un client VoLTE (une couche IMS). De l'avis des opérateurs français, leur préoccupation première ne réside pas là. Ils ont déjà fort à faire pour déployer la 4G classique, qui nécessite un nouveau réseau.

Le fait que la voix emprunte encore le mode circuit a fait dire aux puristes, au début des expérimentations de la 4G, que celle-ci n'appartenait pas à la famille LTE, mais qu'elle devait être normalisée 3,9G. Comme du temps du GSM (Global System for Mobile Communications), le GPRS (General Packet Radio Service) fut considéré comme la 2,5G et Edge la 2,75G. Aujourd'hui, sous la pression marketing, tant des opérateurs que des constructeurs, la 4G actuelle est bel et bien entrée dans la famille LTE. Cet « oubli » de la voix vient du fait que la 4G est fruit des cogitations des informaticiens, qui n'ont pas pris en compte les spécificités de la voix, alors que la 2G et la 3G avaient été mises au point par des opérateurs et des constructeurs télécoms, dont le métier historique étaient précisément la voix.Une architecture toujours en deux parties

Comme tous les réseaux pour mobiles, celui de la 4G LTE se compose de deux parties : l'accès radio eUTRAN (evolved Universal Terrestrial Radio Access Network) et le cœur de réseau l'EPC (Evolved Packet Core) tout IP.

Le passage de la 2,5G à la 3G, se traduisait par des progrès en performances, mais l'architecture du cœur de réseaux est demeurée grosso modo celle élaborée avec l'arrivée du GPRS. Pour marquer une différence, le 3GPP a changé le nom de quelques équipements, mais les fonctions restent les mêmes. Par exemple, la station de base 2G, BTS, devient le Node B, les contrôleurs des stations de base BSC (Base Station Controler) des réseaux 2G sont rebaptisés en 3G des RNC (Radio Network Controller).

Mais les passerelles GGSN (Gateway GPRS Support Node) avec le réseau de données et les passerelles GMSC (Gateway Mobile Switching Centre) vers le réseau voix gardent leur nom et leurs rôles. Le tri entre voix et données s'effectue dans le contrôleur : BSC en GPRS et RNC en 3G. En effet, en 3G les communications téléphoniques restent en mode circuit comme dans le réseau fixe RTC (Réseau téléphonique commuté) ou comme disent les Américains PSTN (Public Switched Telephone Network) ou encore POST (Plain Old Telephone Service).

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Les deux pans de l'architecture schématisés (crédit : Cisco)


L'eUTRAN, la partie radio

Nouveau réseau implique nouvelles fréquences. Dans un souci d'harmonisation européenne, l'ARCEP, le régulateur français, a octroyé deux bandes : 800 MHz et 2600 MHz, selon la répartition suivante : 10 MHz dans la bande des 800 MHz pour chacun des trois opérateurs Bouygues, Orange et SFR ; 20 MHz dans la bande des 2600 pour Free et Orange, 15 MHz pour Bouygues et SFR.

La première appartient au spectre des fréquences dites « en or ». Sa portée est étendue et son pouvoir de pénétration dans les bâtiments important. Idéal pour couvrir de vastes zones rurales où le trafic est peu important. Les opérateurs espèrent d'ailleurs pourvoir utiliser dans le futur la bandes des 700 MHz, lorsque celle-ci sera libérée. La bande des 2600 MHz se caractérise par une atténuation rapide avec la distance, mais offre une grande capacité. Elle est donc surtout utilisée dans les zones denses et urbaines. Mais, parfois, dans des zones de forte activité, une cellule ordinaire, dite macro cellule, ne suffit pas à accueillir tout le trafic des utilisateurs, par exemple, dans un centre commercial, dans un aéroport ou un centre de congrès. Certains opérateurs doublent cette macro cellule d'une mosaïque de micro-cellules, les « Small Cells », dont Alcatel-Lucent a fait l'un de ses fers de lance.

Orange y réfléchit activement (Alcatel-Lucent est l'un de ses deux fournisseurs, l'autre étant Ericcson) ; Bouygues, équipé par Ericsson et Huawei, n'envisage pas de déploiement rapide des « Small Cells » à grande échelle ; SFR, qui a choisi NSN et Huawei, estime ne pas en avoir besoin pour le moment.

En fait, cette solution de « Small Cells » n'est pas propre à la 4G ; elle était déjà utilisée en 3G. SFR et Bouygues proposaient même des cellules encore plus petites, les « Femto Cells » pour, par exemple, desservir une petite entreprise située en zone rurale ou un bâtiment aux murs trop épais pour permettre la propagation des ondes hertziennes à l'intérieur. Cependant, la gestion de ces « Small Cells » sera plus facile en 4G, grâce à des mécanismes tels que SON (Self Organized Network) qui permettent aux stations de base e-Node B de communiquer directement entre elles, au lieu de remonter dans la hiérarchie du réseau comme en 2G et 3G, ce qui permettra de gérer plus efficacement le « Hand Over », c'est-à-dire le passage d'une cellule à l'autre.

Ce seront les stations de base qui décideront entre elles laquelle prendra en charge tel ou tel usager. La solution du Wi-Fi offload, visant à détourner le trafic données sur un réseau Wi-Fi qui aurait la même couverture qu'une ou plusieurs petites cellules, et qui avait fait grand bruit lors du Mobile World Congress de Barcelone en 2012, semble avoir du plomb dans l'aile auprès des opérateurs. L'un des reproches qui lui sont adressés est que, fonctionnant dans la bande des 2400 MHz, bande libre et donc susceptible d'interférences et de perturbations, ce substitut est peu compatible avec une qualité de service de classe opérateur. Cependant, Ericsson, l'un des promoteurs de cette solution, l'offre en standard dans ses équipements micro-cellules.Une bataille juridique

Tout aurait été pour le mieux dans le meilleur des mondes si, mi-2012, Bouygues n'avait pas demandé à l'ARCEP de pouvoir réutiliser la bande des 1800 MHz, réservée aux GSM, pour déployer la 4G.

S'entourant de moult précautions juridiques, l'ARCEP a finalement donné le feu vert à la demande de Bouygues, arguant que le spectre dont dispose l'opérateur dans cette bande est, pour des raisons historiques, sous-utilisé. Le régulateur justifie sa position notamment au nom de la recherche de compétitivité, d'innovation et de protection de l'emploi. En somme, les fréquences étant une ressource rare, il serait dommage de les gaspiller.

Si SFR a décidé de ne pas réagir, en revanche, Free et Orange n'ont pas paru convaincu par cet argument, qui selon eux, fausse la concurrence. Free a donc porté l'affaire devant le conseil d'État et a été débouté en juillet dernier. À son tour, Orange a déposé un recours sur le fond, auprès du conseil d'État, estimant que le premier appel d'offres pour les fréquences 4G ne mentionnait pas le recours possible à la bande des 1800 MHz. Le verdict est toujours attendu. Tout n'est donc pas encore gagné pour Bouygues.

Cependant, si cet imbroglio juridique tourne à son avantage, ses abonnés 2G disposeront bel et bien du spectre alloué dans la bande des 900 MHz et une partie de celle des 1800 MHz ; la 3G restera restera dans celle des 900 MHz et des 2100 MHz qui lui est entièrement consacrée ; enfin, la 4G opérera dans celle des 800, 1800 et 2600 MHz, comme c'est déjà le cas en attendant le verdict.

L'AFNR (L'Agence nationale des fréquences) estime que, au 1er novembre de l'année 2013, 11 345 sites ont été autorisés pour la téléphonie mobile très haut débit (4G), tous opérateurs confondus. Ce chiffre est en hausse de plus de 18,5% sur un mois, sur les trois bandes de fréquences : en 800 MHz (2 521 sites, soit +40% en un mois), en 1800 (5 970, soit +27%) et en 2600 Mhz (6 811, soit +12%).

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La répartition des bandes de fréquences allouées par l'Arcep. Crédit : Wikipédia

Comment transmettre le signal ?

Au-delà de la bataille juridique et indépendamment du choix des bandes de fréquences retenues, deux conceptions du déploiement de l'accès radio s'affrontent : d'une part le réseau dit « Overlay » ; d'autre part, le réseau « Converged ».

Dans le premier cas, il s'agit de déployer un réseau 4G distinct des réseaux 2G et 3G. L'avantage réside dans la rapidité de mise en œuvre. L'inconvénient est qu'il faut adapter le cœur de réseau existant à l'EPC (Evolved Packet Core) qui est celui de la 4G. C'est la voie choisie notamment par Alcatel-Lucent. Elle a séduit l'opérateur espagnol Telefonica (60% de son réseau 4G) et même l'opérateur chinois China Mobile (10%) dans sa version TDD (Time Division Duplexing), spécificité des réseau chinois, tandis qu'en général les autres emploient le FDD (Frequency Division Duplexing).

La première se prête mieux au volume de trafic asymétrique, la seconde est plus facile à déployer. Dans le cas de l'option « Converged », tous les réseaux sont réunis en un seul, ce qui suppose le changement des modules 2 et 3G dans les stations de base e-NodeB. L'avantage est qu'il n'y a qu'une seule plate-forme donc des coûts d'exploitation plus réduits, mais un temps de déploiement plus long.

Côté constructeurs, Ericsson, par exemple, a fait ce choix. Chez les opérateurs, c'est aussi celui d'Orange et de Bouygues. Quant à SFR, « l'opérateur va renouveler tout son réseau, y compris les antennes qui passent en 5 bandes, mais gardera les pylônes. Les stations de base seront raccordées au réseau (collecte) par fibre ou par faisceaux hertziens en mode paquets dans les cas difficiles (équivalent au Gigabit Ethernet). Pour le moment, la voix reste en 2G/3G (Circuit Switch Fallback). Nous ne passerons immédiatement à la VoIP », déclare Annie Rozoy, responsable marketing réseaux chez SFR.

Toujours côté radio, la 4G introduit, dans le sens descendant une nouvelle modulation, l'OFDMA (Orthogonal Frequency Division Multiplexing Access), déjà notamment utilisée en Wi-Fi, en Wimax et en xDSL. Elle offre une meilleure efficacité spectrale et résiste mieux aux interférences.

Pour la 2G, on utilise la modulation TDMA (Time Division Multiple Acces) et pour la 3G le WCDMA (Wideband Code Division Multiple Access). Pour la partie montante, le 3GPP a retenu pour la 4G la modulation CS-FDMA (Carrier Sense Frequency Division Multiple Access), qui peut être considérée, dans les grandes lignes, comme une version simplifiée de l'OFDMA. Cette dissymétrie s'explique du fait que la station de base doit émettre vers tous les terminaux à la fois, alors que le terminal n'émet que vers la station de base. Le CS-FDMA, moins gourmand en énergie, économise donc la batterie.

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Des stations de base eNodeB en test chez Bouygues Telecom. Crédit : Clubic

Autre particularité de la 4G, la généralisation de la technologie MIMO (Multiple Input Multiple Output), également appelée le multi-antenne. Elle consiste à transmettre les informations en plusieurs trains, légèrement décalés dans le temps, et chacun sur une antenne. Ce qui permet de multiplier, théoriquement, le débit de base d'une antenne par le nombre d'antennes. À charge pour le récepteur de tout remettre dans l'ordre. Elle n'est pas réellement nouvelle. Wi-Fi l'utilise depuis la version 802.11n. C'est ainsi qu'on a pu atteindre des débits théoriques de 300 Mbit/s et on attend du 6 Gbit/s théorique avec le 802.11ac.

En 4G, généralement, les équipements sont dotés de systèmes 2x2 (deux antennes pour l'émission et deux antennes pour la réception), avec des variantes 4x2 ou 4x4. MIMO n'a guère été utilisé en 3G. Il le sera en 4G LTE. C'est ce que confirme Cédric Levasseur, architecte réseau chez Bouygues : « Bouygues utilise le MIMO 2x2 . MIMO était possible en 3G+, mais peu d'opérateurs l'utilisaient. Pour atteindre les performances du LTE, il est obligatoire ».

En fait, les limitations du système multi-antenne dépendent plus du terminal que de la station de base. Ces antennes doivent être assez éloignées les unes des autres pour ne pas se perturber, ce qui est plus facile dans un eNode B que dans un smartphone où la place est réduite et qui doit non seulement accueillir les antennes pour la 4G, mais aussi celles de la 3G, la 2G, Wi-Fi, Bluetooth...

Dans l'immédiat, ce seront donc les constructeurs de terminaux qui dicteront leur loi et les tablettes, plus grandes, seront sans doute les mieux adaptées. Le 3GPP a défini cinq classes de terminaux. Par exemple, ceux de la classe I seront limités à 10 Mbit/s dans le sens descendant et a 5 Mbit/s dans le sens montant et ne disposeront d'aucun système MIMO. En revanche, ceux de la classe 5 devraient, toujours théoriquement, atteindre les performances de la 4G (300 Mbit/s descendants et et 75 Mbit/s montants) avec un système MIMO 4x4.Du côté du cœur de réseau

De l'autre côté de la station de base eNode B se trouve le cœur de réseau EPC. Premier constat, le contrôleur BSC en 2G ou RNC en 3G a disparu. Leurs fonctions de contrôle ont été intégrées dans l'eNode B, ce qui leur permet notamment de communiquer directement entre stations de base. Le tri entre voix et données est donc désormais réalisé dans l'eNode B et plus dans le contrôleur. Les communications vocales sont renvoyées vers le MSC (Mobile Switching Centre) des réseaux 2G et 3G.

Pour le reste du trafic, les stations de base communiquent directement en IP avec l'EPC, qui comporte quatre blocs fonctionnels. Le SGW (Serving GateWay) joue le rôle de plan de données, acheminant celles-ci du terminal vers d'autres réseaux, tels que le réseau fixe IP de l'opérateur ou celui d'un autre opérateur. Dans ce cas, les données passent par le deuxième bloc, le PDN GW (Packet Data Network GateWay). Celui-ci prend également en compte la gestion des adresses IP, les règles de trafic et la facturation. Le 3GPP précise que ces passerelles fonctionnent indépendamment l'une de l'autre, mais que, bien souvent, elles sont fournies sous la forme de « tout en un » par les constructeurs.

La mobilité, jadis gérée, par les contrôleurs est désormais du ressort du troisième bloc le MME (Mobility Management Entity). Il traite notamment la signalisation et la sécurité d'accès à l'eUTRAN. Enfin, le HLR (Home Location Register) de la 2G et de la 3G, devenu le HSS (Home Subscriber Server), reprend ce rôle de bases de données d'informations sur les contrats des clients, auquel s'ajoute celui de point d'authentification (Authentication Centre ou AuC).

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Après l'antenne et l'eNode B se trouve l'EPC, qui se présente sous forme d'armoire. Crédit : Ericsson

L'EPC n'est donc « qu'un gros tuyau IP » sans aucun service prévu pour la voix. C'est ce que l'on appelle un réseau « plat », dans lequel tous les équipements IP communiquent directement entre eux sans avoir besoin d'effectuer des allers et retours avec les équipements de niveau supérieur. D'où un gain très sensible de temps de traversée du réseau (latence), ce qui explique le confort de l'affichage des flux temps réel sur les terminaux.

Cette architecture ne convient guère au trafic vocal, qui a des exigences très strictes, peu compatible avec les réseaux informatiques traditionnels. Pour qu'il emprunte l'EPC, il faudra donc intégrer des mécanismes de qualité de service et de hiérarchisation des trafics, car les paquets vocaux doivent être prioritaires, comme on le fait pour la VoIP, par exemple dans les réseaux locaux.

C'est pourquoi, les opérateurs, tous accaparés par le déploiement du LTE de base, n'envisagent pas, pour le moment, d'ajouter des mécanismes comme VoLTE. Il faudra probablement attendre la seconde phase, le LTE-Advanced et que le terminaux intègrent un client VoLTE. Il y en aurait déjà quelques uns en Corée.LTE-Advanced

Considéré par certains comme la véritable 4G (avec le Gigabit WIMAX), le LTE-Advanced, défini par les releases 10 et 11 du 3GPP, apporte outre la voix sur IP en natif avec le mécanisme VoLTE, des améliorations qui permettent de faire grimper encore les débits.

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Parmi celles-ci, trois apparaissent fondamentales. La première concerne l'agrégation de porteuses (Carrier Aggregation). Elle permet d'agréger toutes les porteuses disponibles dans toutes les bandes. En conséquence, la bande passante peut atteindre 100 MHz contre 20 MHz en LTE. La deuxième porte sur l'extension de l'utilisation de la technologie MIMO jusqu'à des systèmes 8x8.

Du coup, le 3GPP a défini trois nouvelles classes de terminaux capables de répondre à ces exigences. Enfin, la technologie « CoMP » (Coordinated Multi-Point) complète celle du SON et offre de meilleures performances dans les zones mitoyennes de deux cellules grâce aux techniques de micro-synchronisation entre elles. En pratique, chaque terminal est suivi simultanément dans deux cellules et ce sont elles qui décident, après échange d'informations notamment sur les conditions de transmission, laquelle le prend en charge.

Évolution radicale d'architecture par rapport à 2G et à la 3G, puisque les décisions sont prises à la périphérie et non plus en cœur de réseau. D'où un gain d'efficacité. Moyennant toutes ces innovations, certains constructeurs avancent le chiffre de 1 Gbit/s descendant en mode statique (utilisateur immobile).

Alors que le LTE-Advanced est déjà exploité au Japon (chez l'opérateur Docomo) et en Corée du Sud, les expérimentations viennent seulement de commencer en Europe, et notamment en France. Et avec les américains qui avaient loupé la marche de la 3G et se sont lancés à fond dans la 4G, le vieux continent se retrouve désormais un peu à la traine.

Et la 5G ?

C'est encore un fantasme. Certes, en Asie, on commence à en parler, mais le 3GPP n'a encore rien défini. Cependant, certains la prédisent pour 2020. Pour sa part, la Commission européenne a annoncé en mars dernier des subventions pour un montant total de 50 millions d'euros destinés à des projets liés à la 5G, et vient d'annoncer la formation du 5GPPP.

Quant à Samsung, il est déjà sur le métier faisant état de tests qui permettrait d'atteindre en 2020 les 10 Gbit/s. Car, il existe encore des technologies prêtes à être mis en œuvre et qui pourraient constituer les briques de la 5G. Un exemple : le beam forming ou les antennes intelligentes. L'idée n'est pas nouvelle. Les premières démonstrations avaient été réalisées dès 1999 au salon Télécom Genève.

Une antenne classique rayonne à 360 ou 180 ou 90°, uniformément dans toutes les directions, même là où il n'y a personne pour recevoir le signal. Les antennes intelligentes concentrent leur puissance là où il y a des terminaux et elles calculent en permanence le meilleur chemin pour les atteindre et se reconfigurent instantanément pour obtenir l'efficacité optimale. Il y a donc plus de débit, moins d'énergie perdue et une meilleure portée. Ce mécanisme est déjà intégré dans la norme Wi-Fi 802.11ac. Elle pourrait l'être, pourquoi pas, dans la 5G.

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Sur le salon Ceatec, l'opérateur japonais Docomo présentait déjà en octobre sa vision de la 5G

Conclusion

Si l'on excepte le passage de l'analogique (exemple, Radiocom 2000) au numérique (GSM), la première rupture technologique dans les réseaux pour mobiles se situe peut-être moins dans la migration de la 2G vers la 3G, que dans l'apparition du GPRS (2,5G). Pour la première fois, on introduisait la transmission de données dans le monde des mobiles, avec la création d'une architecture spécifique. Le débit était modeste : une centaine de Kbit/s.

La 3G a introduit des innovations technologiques, surtout au niveau radio, et, avec les évolutions successives (HSDPA, HSUPA, HSPA), le débit descendant est monté jusqu'à une quarantaine de Mbit/s. Mais l'architecture globale, tant côté radio que cœur de réseau, n'a pas changé (sinon le noms de certains équipements, mais ils remplissent les mêmes fonctions).

La rupture est plus ample avec la 4G, mais pas totale, puisque la voix reste en mode circuit. Cependant, elle révèle une profonde évolution à l'intérieur du 3GPP, le faiseur de normes : ce ne sont plus les téléphonistes qui font la loi, mais les informaticiens. Le cœur de réseau, l'EPC, est un réseau IP, plat, comme ils les aiment et ils ne se sont pas soucié de la voix. Il faudra donc attendre le LTE-Advanced, avec VoLTE (donc la voix sur IP), pour que la rupture soit totale.
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