Live Japon : disques vinyles, Murakami et ses compatriotes

10 janvier 2016 à 15h36
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« J'ai toujours continué d'écouter de la musique sur une platine vinyle, le son est moins aseptisé que le CD, que ce soit pour la musique classique ou le jazz ». Qui parle ? Haruki Murakami, en marge d'un entretien exclusif avec l'auteur de cette chronique, en août 2014, pour l'AFP et Le Point. On parlait alors musique, un thème récurrent dans son oeuvre, et ce, depuis l'origine. Ses deux premiers romans Ecoute le chant du vent et Flipper 1973, qui paraîtront le 14 janvier 2016 en France pour la première fois (ils ont été publiés au Japon en 1979 et 1980) sont traversés de musique (on y croise même Polnareff et Adamo !). Et à l'époque où l'histoire est située, on ne parlait pas de CD.

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Les microsillons sont un monde en soi pour Murakami qui, avant de devenir romancier « par hasard », tenait un bar à jazz à Tokyo. Aujourd'hui, quand il écrit, à Hawaï ou Tokyo, il écoute de la musique. Et son plus récent roman paru en France en 2014, Tazaki Tsukuru et ses années de pèlerinage fait référence à une musique classique, de Liszt. En restant attaché aux disques analogiques, Murakami, à la traîne il y a 15 ans, est à la page aujourd'hui. C'est paradoxal, mais c'est ainsi.

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A l'ère des Spotify, Google Play Music et autres services mondiaux de musique en flux, à l'ère du téléchargement de fichiers « flac » et des baladeurs high-resolution audio, un nombre croissant de personnes se régalent les oreilles avec des imperfections de microsillons. Et ce sont les mêmes parfois que ceux qui, à l'extérieur, se promènent avec un baladeur et un ampli portable high-reso. C'est vrai en France, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis et a fortiori au Japon, pays connu pour ses incroyables collectionneurs. « Il y a dans ces disques des histoires et c'est cela qui me plaît, cela que je recherche quand j'achète un vinyle d'occasion », raconte un propriétaire de bar qui passe des heures à fouiner dans les boutiques spécialisées.

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Côté matériel, on trouve grosso modo au Japon les mêmes platines que celles proposées à la Fnac en France. Et pour cause, beaucoup sont d'origine nippone : Audio Technica, Denon, Teac, Sony, Onkyo, Pioneer, pour ne citer que les plus présentes en rayon. Les prix vont de 70 euros pour l'entrée de gamme à plus de 1500 euros pour les modèles les plus perfectionnés. Au milieu, il existe pas mal d'exemplaires avec une prise USB pour relier la platine à un PC ou Mac et numériser ses propres disques. Voilà pour les appareils neufs.

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Mais on trouve aussi pour 350 à 450 euros quelque exemplaires d'occasion des bonnes vieilles Technics SL1200 MK. Tous ceux qui ont gravité dans les univers des DJ et des radios libres dans les années 80 et au-delà connaissent ces engins là, inégalés pour les « synchro tempo » avec leur pitch et autres fonctionnalités.

Technics, la marque (créée par Matsushita Electric Industrial, autrement dit Panasonic) a disparu durant une dizaine d'années pour renaître en 2014, en misant sur l'engouement pour le son high-resolution et le nombre croissant d'audiophiles de par le monde. L'an passé, a été présenté dans plusieurs salons électroniques internationaux (dont le Ceatec à Tokyo) un prototype d'une nouvelle platine vinyle haut de gamme qui doit venir prendre le relais de la série SL1200. Autant vous dire qu'elle est attendue avec impatience par des mélomanes fortunés.

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Le quartier de Shibuya à Tokyo, réputé pour son carrefour à vagues de piétons, son chien de pierre Hachiko, ses boutiques de fringues et ses restaurants, où les jeunes excentriques affluent, où les dénicheurs de mode font provision d'idées, est aussi devenu le repaire des amateurs de disques vinyles. Le terrain y était propice, il est vrai, puisque Shibuya a, de longue date, été le quartier des HMV, Tsutaya et autres enseignes de disques. Désormais, un HMV pour vinyles y rencontre le succès alors que le Tower Records à CD a mis la clef sous la porte. A Shibuya, on compte au moins une demi-douzaine de spacieux magasins spécialisés dans les 45 et 33 tours neufs et d'occasion venant du monde entier.

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Allez savoir pourquoi, les Japonais sont particulièrement doués quand il s'agit de récupérer ce genre de pièces rares. Avant que cela ne redevienne la mode partout, quand les particuliers et disquaires des autres pays se débarrassaient à tour de bras de leurs vieux disques qu'ils croyaient devenus sans valeur, pas mal atterrissaient au Japon et se retrouvaient dans des boutiques de collectionneurs. Des artistes français profitaient souvent d'un passage à Tokyo pour racheter des albums qu'ils ne trouvaient plus qu'en CD ailleurs. Aujourd'hui plus encore, les spécialistes se démènent pour importer des nouveautés (car il en sort pas mal) et dégoter des raretés au Japon et ailleurs. Et la bataille se joue sur les collectors et exclusivités.

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Les vendeurs en ligne aussi profitent de la vague : Amazon Japan a bien sûr un espace « LP record » où se monnayent (parfois très cher) des dizaines de milliers de disques. De quoi passer des heures à rechercher on ne sait quoi qu'on possédait peut-être autrefois, qu'on a jeté, qu'on a racheté en CD qu'on a aussi dégagé avant de rechercher le même album en streaming et de le télécharger. Mais le vinyle fragile avec sa pochette et toute la gestuelle jusqu'à l'écoute (pleine de surprises), c'est quand même bien.
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