Live Japon : la surprise Nintendo que tous attendaient

21 mars 2015 à 10h42
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21% puis 11% : en deux jours cette semaine, l'action du pionnier japonais des jeux vidéo Nintendo a gagné par moins de 5 000 yens, près d'un tiers de sa valeur d'avant l'annonce qui allait surprendre tout le monde et réjouir une grande partie des investisseurs.
C'est qu'ils rongeaient leur frein depuis des années, appelant urbi et orbi la maison-mère de Mario, Pikachu, Zelda et autres personnages vedettes à franchir le Rubicon, à créer, et vite, des jeux pour les smartphones en plus des consoles.

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Eh bien voilà, c'est annoncé : et c'est le patron de Nintendo, Satoru Iwata, qui a justifié le retournement mardi dernier lors d'une conférence de presse convoquée au dernier moment, sans (pour une fois) des fuites auparavant dans les journaux.
L'information a été initialement présentée comme un partenariat assorti d'un échange de participation avec la société nippone DeNA, réputée au Japon pour son portail Mobage de jeux pour mobiles, mais dont le nom est inconnu à l'étranger.
Le but de cette alliance est le développement d'applications de jeux pour smartphones, et c'est là que l'annonce prend toute sa dimension, même si Nintendo a pris bien soin d'insister sur la priorité que la firme de Kyoto continuait d'accorder aux consoles, promettant même un nouveau concept sous le nom de code NX, « dont il est difficile de parler dès à présent mais dont les détails devraient pouvoir être donnés l'an prochain ».


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Tout en s'associant à la société DeNA pour faire la promotion de ses personnages vedettes via la plateforme pour mobiles de cette firme nippone, Nintendo va aussi gérer en commun un service d'utilisateur et un programme de fidélité, selon un bref communiqué conjoint. 
« J'imagine que pour beaucoup d'entre-vous ce partenariat est inattendu », s'est amusé M. Iwata.
Concrètement, Nintendo va prendre 10% de DeNA pour 22 milliards de yens (170 millions d'euros), tandis que ce dernier va acquérir 1,24% de Nintendo pour la même somme, une participation croisée censée matérialiser l'entente de coopération.
Nintendo espère en tirer une meilleure promotion de son patrimoine, tandis que DeNA souhaite doper son expansion internationale en s'alliant à la ribambelle de stars qui font le succès des jeux de Nintendo à travers le monde, qu'il s'agisse du célèbre plombier moustachu Mario, de Zelda ou de Pikachu.

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« Nous inaugurons une nouvelle ère d'utilisation de notre patrimoine » pour capter l'attention du public, a expliqué M. Iwata.
Pas question cependant de proposer les mêmes jeux que sur consoles, pour ne pas cannibaliser l'activité centrale du groupe. C'est que M. Iwata reste persuadé que les smartphones, tout multimédias et puissants qu'ils soient, n'ont pas les capacités des machines de jeu dédiées.

« Nous n'avons pas du tout l'intention de porter des titres de jeux existants pour consoles vers d'autres appareils intelligents comme les smartphones,  parce que si nous ne pouvons pas offrir à nos clients les meilleurs jeux possibles, nous risquons tout simplement de ruiner la valeur de Nintendo ».

« Nous allons continuer à faire de notre mieux pour développer des titres de jeux dédiés à nos plates-formes matérielles comme nous l'avons toujours fait jusqu'à présent. Pour les smartphones, nous allons créer de tout nouveaux jeux correspondant au style de divertissements adaptés à ces appareils ».

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Alors que la position tenue jusqu'à présent risquait de conduire Nintendo à la ruine, l'évolution montre que le groupe a désormais compris qu'il ne pouvait passer à côté des possibilités qu'offre la possession de smartphones multimédias par une proportion croissante de personnes dans toutes les catégories de public.
Cependant, ce n'est pas le même business, enfin pas tout à fait : « les jeux vidéo sur mobiles sont plus des services évolutifs à entretenir que des produits finis » vendus une fois pour toutes, a insisté M. Iwata pour justifier le partenariat avec DeNA.

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Et qu'on ne dise pas qu'il a été aveugle à ce qu'il se passait dans un univers ludique numérique dont les fabricants de consoles ne sont plus nécessairement le centre névralgique.
« Au cours des dernières années, nous avons de plus en plus entendu une variété d'opinions sur l'avenir des consoles, et notamment des avis relativement pessimistes. De fait, nous avons moins bien que prévu négocié le tournant de la DS à la 3DS et de la Wii à la Wii U. Je comprends que cette situation ait pu inciter les gens à penser que les consoles étaient rattrapées par les smartphones. Mais il y a une grande différence : Nintendo est le plus gros fournisseur de jeu pour ses consoles et continue de vendre des titres par millions... »

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A cet égard, le patron de DeNA a souligné ce qui méritait en effet de l'être : « Beaucoup de fournisseurs de contenus qui rencontrent le succès avec des jeux pour smartphones dépendent d'un seul titre ou guère plus ». Le créateur de Angry Birds, la société finlandaise Rovio, en sait quelque chose, qui tente désormais de valoriser son oeuvre en perte de vitesse à travers un film d'animation.
Quels que soient les arguments défensifs de M. Iwata, il reconnaît que c'est plus compliqué de convaincre le public de dépenser 150 à 300 euros pour une console et 20 à 50 euros pour des jeux. « Nos affaires restent viables et nous ne partageons pas le pessimisme de certains sur l'avenir des consoles ».

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Reste que l'annonce de mardi marque une évolution notable de la maison mère des Pokemon, jusqu'ici assez rétive à employer ses personnages vedettes ailleurs que dans des jeux pour ses consoles.
A vrai dire, depuis un an, on voyait poindre des indices de la part de la direction de Nintendo qui ne pouvait pas ne pas voir que le contexte changeait avec l'engouement pour les divertissements pour smartphones, des distractions souvent peu chères quand elles ne sont pas carrément gratuites.
C'est pour cela que Nintendo, une maison centenaire initialement spécialisée dans les jeux de cartes, va encore se « métamorphoser » pour s'adapter aux circonstances, avait déclaré le patron, il y a un peu plus d'un an.

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Il avait alors déjà indiqué que Nintendo allait développer des applications « ludiques » pour smartphones et tablettes dont le but sera de mieux faire connaître ses jeux, consoles et personnages, mais sans s'y substituer. Ces "applis" devront néanmoins être « suffisamment attractives et amusantes pour inciter les utilisateurs à les activer tous les jours ».
Depuis, « j'ai en permanence réfléchi à la façon dont on pouvait dynamiser notre activité et doper nos affaires avec l'usage des smartphones », a-t-il assuré.

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C'est qu'il y avait urgence à agir.  Nintendo est en effet dans une difficile situation financière inquiétante depuis plusieurs années, avec des ventes en chute libre (réduite d'un quart en l'espace de six ans). Même avec son rebond de la semaine, l'action de Nintendo vaut encore près de 5 fois moins qu'il y a huit ans, quand l'entreprise était en pleine ascension grâce au succès de la Wii et de la gamme DS. Les observateurs n'hésitent pas, contrairement à M. Iwata, à imputer la cause de la débandade à la concurrence des jeux sur smartphones.
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