Alain DUCASS, chef de mission TIC : "Il faut que des pionniers essuient les plâtres"

01 février 2005 à 00h00
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Alain DUCASS, chef de mission à la DATAR, précise les enjeux de l'aménagement numérique du territoire à travers des exemples concrets.

AB - Bonjour Alain DUCASS. Polytechnicien de formation, Chef de mission TIC à la DATAR, co-Président de X-Afrique... Etes-vous un des "électrons libres" dont la société francophone de l'information a besoin pour se développer ?

AD - Pas un électron libre mais un électron qui gravite autour de deux noyaux :

L'un comme fonctionnaire de l'Etat, je m'attache à mettre en oeuvre la politique Gouvernementale RESO 2007 et à contribuer à la faire évoluer, en restant à l'écoute des acteurs du terrain comme on peut le faire à la DATAR mieux que nulle part ailleurs dans l'administration.

L'autre comme citoyen, désireux de mettre mon expérience de développement économique local au service de ceux qui en ont le plus besoin, notamment les PME et plus encore les habitants de l'Afrique.

AB - Les enjeux de l'aménagement numérique du territoire sont énormes. Quels en sont les objectifs majeurs, la couverture haut débit, la mobilité, la convergence ?

AD - Je ne crois pas que l'attractivité d'un territoire puisse résulter du seul fait des politiques, des entreprises et des laboratoires.

La compétitivité d'un territoire nécessite une mobilisation de la société civile car les gens ne passent finalement que 10% de leur temps au travail (8 heures par jour _33%_ x 200 jours par an _60%_ x 40 ans pour les plus actifs _50%_). Un territoire qui essayerait de se passer des 90% restants risquerait fort de rester à la traîne de la compétition internationale.

Quant à mobiliser la société civile, on ne peut pas le faire sans donner à tous la possibilité d'être connectés toujours et partout, de façon simple et aussi de leur donner des avantages comme par exemple le télétravail.

AB - Quels sont les clés du succès en matière d'aménagement numérique du territoire ?

AD - Agir avec bon sens et disposer d'une bonne information.

Il n'est pas suffisant de développer les infrastructures, les services ou les usages. Les trois domaines évoluent, s'interpénètrent et requièrent la même attention.

Il faut s'intéresser aux trois thèmes en y associant leurs trois acteurs clés que sont les collectivités publiques, les entreprises et la société civile.

Par ailleurs, il n'est pas suffisant de régler la fracture numérique du moment, il faut anticiper celle qui se produira demain car la fracture numérique évolue tous les ans :

Couverture mobile en 2002, moyen débit (ADSL) en 2003, services dégroupés en 2004, haut débit (DSL2+) en 2005, haut débit mobile (UMTS et 802.20) en 2006, très haut débit (VDSL) en 2007, etc.

Enfin, notons que les politiques ont une grande responsabilité car leurs choix d'aujourd'hui en matière d'aménagement numérique du territoire auront des conséquences à long terme.

Gare aux élus qui ne traitent pas sérieusement la question aujourd'hui car leurs électeurs de 2007-2008 auront accès aux cartes et aux chiffres qui sont progressivement mis en ligne par la DATAR (www.datar.gouv.fr/TIC) !

AB - Que pensez-vous d'un projet comme le "Pau Broadband Country" qui vise à fournir des débits de 100 Mb/s symétriques ? La course aux débits est-elle une priorité ?

AD - Les besoins en débit doublent chaque année depuis plus de 10 ans et chaque année pour une raison différente. La croissance exponentielle n'est pas près de s'arrêter ! Il s'est vendu cette année plus d'appareils photos numériques qu'analogiques et une majorité de téléphones mobiles avec la fonction photo.

A l'heure où le Japon déploie le très haut débit (>100 Mb/s) pour plus de 30 millions de ménages, la France ne peut pas rester inactive.

A ce titre, l'expérience de Pau est une excellente initiative même si elle n'est pas transposable sous une forme identique. Il faut des pionniers qui essuient les plâtres afin que d'autres profitent ensuite de leur expérience.

Quant aux habitants de Pau, je pense qu'ils seront aussi gagnants peut-être à court terme, grâce aux nouveaux services dont ils bénéficieront, et certainement à moyen terme grâce aux entreprises qui s'implantent à cet endroit, à la culture du très haut débit qui se développe sur place et qui en fait un territoire de plus en plus attractif.

AB - Pensez-vous que les mouvements alternatifs et les blogs aient autant d'impact sur l'économie numérique que des évènements tels que le Forum économique mondial de Davos et le Sommet mondial de la société de l'information (SMSI) ?

AD - Si on considère une répartition du temps de 10% passé au travail et de 90% ailleurs, il est évident que l'appropriation des outils de communication par la société civile est un phénomène fondamental que le SMSI, le Forum de Davos comme le Forum social de Porto Alegre commencent à prendre en compte.

N'oublions pas que c'est l'Internet qui a entraîné le changement de présidence en Corée du Sud, en faisant contrepoids à l'information de la presse classique.

AB - Alain DUCASS, je vous remercie.
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